Le cadre de référence est la psychologie cognitive et l'auteur J. Giasson.
GIASSON, J., 1990. La compréhension en lecture. Bruxelles : De Boeck.
GIASSON, J., 2012. La lecture, apprentissages et difficultés. Bruxelles : De Boeck.
Le modèle de lecteur présenté par J. Giasson dans son ouvrage, La compréhension en lecture (1990), permet d’ébaucher une liste de stratégies de compréhension-interprétation.
A partir des travaux de J. Irving, J. Giasson présente le lecteur (voir schéma ci-dessous) en distinguant les structures cognitives - « les caractéristiques que possède le lecteur indépendamment des situations de lecture » c’est-à-dire les connaissances sur la langue et sur le monde, les structures affectives - le rapport à la lecture - et les processus qui « font référence à la mise en oeuvre des habiletés nécessaires pour aborder le texte et au déroulement des activités cognitives durant la lecture ». Ces différents processus ne sont pas à penser comme successifs. Ils sont mobilisés en fonction des besoins du lecteur et, pour certains de ces processus, simultanément.
Le lecteur reconnaît les mots, les regroupe en unités signifiantes et sélectionne les éléments importants. Ces micro-processus lui permettent de comprendre l’information contenue dans une phrase. Pour ce faire, il mobilise ses connaissances sur la langue, plus précisément ses connaissances phonologiques, syntaxiques et sémantiques.
Puis, au fur et à mesure de la lecture, il fait des liens entre les différentes phrases ou parties du texte en s’appuyant sur l’identification et la compréhension des indices de cohésion que sont les reprises anaphoriques et les connecteurs. Ce sont les processus d’intégration. Il produit des inférences, c’est-à-dire qu’il utilise des éléments d’information explicites d’un texte afin de créer une information implicite. Les inférences de cohérence sont essentielles parce qu’en faisant le lien entre les différents événements, entre les motivations des personnages et des actions par exemple…, elles permettent la construction du squelette du texte. Le lecteur procède aussi à des inférences pragmatiques en puisant dans ses connaissances sur le monde. Celles-ci lui permettront de faire des liens entre les informations mais aussi de combler les lacunes du texte.
Au long de la lecture, le lecteur construit une compréhension globale du texte en s’appuyant sur ce qu’il a découvert grâce aux microprocessus et aux processus d’intégration et en repérant la structure du récit. Le lecteur met en relation buts, actions et conséquences. Grâce à cette compréhension globale du texte, il est capable de proposer un rappel du récit, c’est-à-dire de raconter l’histoire qu’il vient de lire, ou d’en faire un résumé en ne gardant que les idées essentielles. Ce sont les macroprocessus.
Le lecteur utilise également des processus d’élaboration. Il peut se créer des images mentales, autrement dit se faire un film. L’obligeant à être attentif, ce processus lui permet la mise en mémoire et la structuration des informations mais aussi le repérage d’éventuels problèmes de compréhension. Il peut aussi réaliser des prédictions, ces hypothèses faites à partir des indices recueillis dans le texte, des prédictions qu’il invalidera ou non par la suite. Le lecteur peut également se laisser aller à ses émotions. Celles-ci sont « à la base du principe d’identification aux personnages, moteur essentiel de la lecture de fiction ». Cet engagement émotif lui permet d’être plus actif et donc de mieux « comprendre et (…) retenir l’information contenue dans ce texte ». Le lecteur peut encore raisonner, prendre de la distance avec le texte, poser un regard critique sur lui et ainsi le dépasser.
Enfin le lecteur expert utilise des processus métacognitifs, la métacognition étant la connaissance et le contrôle qu’une personne a sur ses stratégies cognitives. Il est « conscient de ses ressources et de ses limites cognitives, de ses intérêts, de sa motivation ». Il est aussi conscient des exigences de la lecture dans laquelle il s’est engagé et pilote sa compréhension
C’est donc l’ensemble de ces processus et connaissances qui permettent au lecteur de comprendre un texte. Lorsque ces différents processus sont automatisés, ils sont nommés habiletés alors que si le lecteur les utilise consciemment, ce sera le terme de stratégie qui sera employé. On parle en fait de stratégie « lorsque le lecteur décide consciemment d’utiliser un moyen ou une combinaison de moyens pour comprendre un texte ».
A partir de cette description, nous pouvons réaliser une première liste de stratégies :
Se pose néanmoins une question. Si ces stratégies sont nécessaires face à tout type de texte, sont-elles pour autant suffisantes lorsque le lecteur a affaire à une oeuvre littéraire qui a ses propres spécificités ?
Extrait de mon mémoire de Master 2,
Le racontage, initiation à la lecture littéraire, 2017