Des poètes ont choisi de s'engager, de défendre leurs idées. C'est le cas de Victor Hugo au XIXème siècle par exemple et de nombreux poètes au XXème siècle, Louis Aragon, Paul Eluard par exemple.
Je vous propose de découvrir le poème "Gabriel Péri".
Gabriel Péri était un communiste. Il avait des responsabilités dans le Parti Communiste Français (PCF), écrivait dans l'Humanité (le journal du PCF) et était député. En mai 1941, il est arrêté par les Nazis et fusillé comme otage le 15 décembre. Il a refusé de signer une déclaration condamnant le terrorisme.
Un homme est mort qui n’avait pour défense
Que ses bras ouverts à la vie
Un homme est mort qui n’avait d’autre route
Que celle où l’on hait les fusils
Un homme est mort qui continue la lutte
Contre la mort contre l’oubli
Car tout ce qu’il voulait
Nous le voulions aussi
Nous le voulons aujourd’hui
Que le bonheur soit la lumière
Au fond des yeux au fond du cœur
Et la justice sur la terre
Il y a des mots qui font vivre
Et ce sont des mots innocents
Le mot chaleur le mot confiance
Amour justice et le mot liberté
Le mot enfant et le mot gentillesse
Et certains noms de fleurs et certains noms de fruits
Le mot courage et le mot découvrir
Et le mot frère et le mot camarade
Et certains noms de pays de villages
Et certains noms de femmes et d’amies
Ajoutons-y Péri
Péri est mort pour ce qui nous fait vivre
Tutoyons-le sa poitrine est trouée
Mais grâce à lui nous nous connaissons mieux
Tutoyons-nous son espoir est vivant.
Paul Éluard
Au rendez-vous allemand, Paris, Éditions de Minuit,
1945.
© Éditions de Minuit
Que ressens-tu à la lecture de ce poème ?
Pourquoi, à votre avis, Paul Eluard écrit-il ce poème ?
Quelles valeurs défend-il ?
Et si nous reprenions le poème de Paul Eluard pour écrire un poème en hommage aux journalistes de Charlie Hebdo...
Nous sommes Charlie D'après Paul Eluard
Un homme est mort qui n’avait pour défense
Que ses bras ouverts à la vie
Un homme est mort qui n’avait d’autre route
Que celle où l’on hait les fusils
Un homme est mort qui continue la lutte
Contre la mort contre l’oubli
Car tout ce qu’il voulait
Nous le voulions aussi
Nous le voulons aujourd’hui
Que le bonheur soit la lumière
Au fond des yeux au fond du cœur
Et la justice sur la terre
Mais il y a des mots qui font mourir
Et ce sont des mots violents
Le mot nuage et le mot orage
Mirage carnage et le mot rage
Le mot menace et le mot haine
Le mot malheur et le mot désespoir
Et certains lieux de mémoire et certains cris
Le mot colère et le mot honte
Et le mot humiliation et le mot souffrance
Et certains noms de monstres, Hitler, Klaus Barbie, Mengele
Et certains noms de guerres
Heureusement il y a aussi des mots qui font vivre
Et ce sont des mots innocents
Le mot chaleur le mot confiance
Amour justice et le mot liberté
Le mot enfant et le mot gentillesse
Et certains noms de fleurs et certains noms de fruits
Le mot courage et le mot découvrir
Et le mot frère et le mot camarade
Et certains noms de pays de villages
Et certains noms de femmes et d’amies
Le mot famille et le mot ami
Joie tendresse et le mot bonheur
Le mot voyage et le mot nature
Le mot soleil et le mot lumière
Et certains noms de planètes et certains noms d'étoiles
Le mot époustouflant et le mot rêve
Et le mot réconfort et le mot fierté
le mot merveilleux et le mot sublime
Et certaines couleurs
Et certains noms de héros
Ajoutons-y Cabu, Charb, Oncle Bernard
Ils sont morts pour ce qui nous fait vivre
Tutoyons-les leur poitrine est trouée
Mais grâce à eux nous nous connaissons mieux
Tutoyons-nous leur espoir est vivant.
Paul Eluard a écrit ce poème en 1942, en pleine guerre. Il ouvrait le recueil Poésie et Vérité. Des milliers d'exemplaires de ce recueil ont été parachutés par des avions anglais dans les maquis.
Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J'écris ton nom
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sans papier ou cendre
J'écris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom
Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom
Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom
Sur chaque bouffée d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom
Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes maisons réunies
J'écris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom
Sur le tremlin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom
Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom
Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Liberté.
Que ressens-tu en lisant ce poème ? en l'écoutant ?
Quel message Paul Eluard nous transmet-il dans ce poème ?
Comment ce poème est-il construit ?
Si nous écrivions un poème sur la fraternité...
Contraintes :
Pour faire comme Paul Eluard
Pour être des créateurs aussi